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Il est grand temps de prendre les blessures de l’enfance au sérieux.

Pour cette année 2023 qui commence, mon cadeau de fin d’année est une réflexion. Que nous puissions continuer à tisser le fil de nos pensées ensemble.


A quoi aspirons-nous ? Où allons-nous ? Que cherchons-nous ?


La santé mentale (qui est l’absence de maladie mentale ) ?

La raison (avec le risque de nous ennuyer à mourir) ?

Le bonheur (qu’est-ce-que c’est ?) ?


« Si nous en sommes arrivés à cette situation désastreuse, c’est parce-que nous, les

personnes de ma génération, étions complètement dominés par Freud, Marx, Darwin,

Durkheim, Weber… et aucun d’entre-deux n’a rien à dire sur là où nous allons… »


Oliver James, auteur du livre « Ils te foutent en l’air » (2003), donne une conférence en

2015 à la Leeds Beckett University pour la Journée Universitaire de la Santé Mentale et

y affirme, avec beaucoup d’humour, que si vous êtes britannique, vous pouvez oublier

votre aspiration au bonheur.





Durant cette conférence, Oliver James aborde 3 thèmes de la plus haute importance :

1- l’environnement propice à la maladie mentale

2- la survalorisation sociale des causes génétiques

3- l’attention insuffisante que l’on donne à ce qui a lieu au sein de la famille


Nous aborderons, dans cet article, ces deux premiers thèmes, et nous laisserons le

troisième pour le cycle Alice Miller, qui débute dans trois semaines.


1- L’environnement propice à la maladie mentale


Oliver James affirme que les causes fondamentales de la maladie mentale ne sont

pas suffisamment discutées. Il nous rappelle qu’en effet, l’industrialisation et

l’urbanisation sont propices à la maladie mentale, et il partage avec nous des données

statistiques qui donnent à réfléchir :


- Si vous êtes une femme, vous avez deux fois plus de chances de tomber malade

de dépression.

- Si vous êtes un homme, vous avez deux fois plus de chances de souffrir d’une

addiction liée à la consommation de substances.

- Si vous vivez en ville, vous avez deux fois plus de chances de souffrir d’une

maladie mentale.


- Si vos parents se sont séparés, vous avez également deux fois plus de chances

de souffrir d’une maladie mentale.

- Plus vous êtes agé.e, moins vous avez de probabilité de souffrir d’une maladie

mentale. La dépression affecte davantage la catégorie des 16-24 ans, bien que

la 50-aine (le « middle-age ») présente une augmentation de l’incidence de

maladie mentale.

- La probabilité de souffrir d’une maladie mentale est deux fois plus élevée dans le

monde anglophone capitaliste – avance James : les États-Unis, par exemple,

détiennent un taux très élevé de maladie mentale. L’impact de l’économie

politique (le libéralisme, le thatchérisme, les Reaganomics), sur l’état de santé

mentale des populations, est avéré.

- Plus nous sommes matérialistes (« Shop til you drop » - « Achète jusqu’à en

tomber »), plus nous risquons de souffrir de maladie mentale (anxiété, désordres

de la personnalité, abus de substances).

- Plus il y a d’inégalités, plus il y a d’individualisme, plus grands sont les risques de

maladie mentale.


2- La survalorisation sociale des causes génétiques


Sur cet aspect, Oliver James se divertit avec le Projet du Génome Humain, lorsque

ce dernier arrive à la conclusion que sa grande découverte consiste à annoncer que

96,6% des cas de squizofrénie NE SONT PAS d’origine génétique.


Lors de cette conférence, Oliver James dénonce la croyance en l’héritabilité génétique :

« Heritability is a faith ». L’ héritabilité est une croyance.


Voici comment apparaît la définition dans Google lui-même – nous pouvons constater comment les caractéristiques physiques sont placées au même niveau que la squizofrénie ou l’autisme:


"L'héritabilité est une mesure de la façon dont les différences dans les gènes des

gens expliquent les différences dans leurs traits. Les traits peuvent inclure des

caractéristiques telles que la taille, la couleur des yeux et l'intelligence, ainsi que

des troubles tels que la schizophrénie et les troubles du spectre autistique."


L’école de psychologie de Francfort prend en compte la dimension socio-économique,

en plus de la dimension locale de la famille et des premières années de vie, comme

étant de la plus haute importance pour comprendre une personne.


3- L’attention insuffisante que l’on donne à ce qui a lieu au sein de la famille


Oliver James explique le titre de son livre « Ils vous foutent en l’air » (2003), qui est cité

en référence par Alice Miller dans l’introduction de « The Body Never Lies » – « Le

corps ne ment jamais », traduit en français et en espagnol.


Il s’inspire du poème de Philip Larkin (1922-1985), intitulé « This Be The Verse » - « Tel

Soit Le Dit », que nous citerons (en version originale, et dans sa traduction française

par Guy Le Gaufey) en conclusion.


Toutes les preuves scientifiques s’articulent actuellement autour de l’impact des circonstances de la mère durant la grossesse, telles que le manque d’amour (« unresponsiveness ») ressenti par l’enfant – le terme « amour » étant entendu comme la « capacité de répondre aux nécessités basiques de l’enfant », c’est-à-dire :

- l’affect

- l’attention

- le soin

- la protection

- la gentillesse

- le désir de communiquer.


Dans la conférence mentionnée, Oliver James critique aussi la théorie de la résilience,

qui peut être mal comprise et maintenir des processus individuels de dénégation (« J’ai

eu une enfance heureuse »), comme par exemple nous amener à penser que les six

premières années de la vie ne sont pas cruciales et fondamentales et que si, lors de

ces années, il y a eu maltraitance, il est possible de ne pas développer de traits de

maladie mentale.


Oliver James parle également de yoga et de pleine conscience comme outils de grande

valeur, surtout dans le but d’éviter des rechutes. Il dit pratiquer lui-même dix minutes

tous les matins et tous les soirs depuis 27 ans, mais laisse clairement entendre que

cela ne peut se substituer à la thérapie en tant que remède.


Par ailleurs, lorsqu’il aborde le thème de la validité de la thérapie cognitivo-

comportementale (TCC en français, CBT – Cognitive Behavioural Therapy en anglais),

Oliver James se positionne très clairement. Il affirme que si, dans certains cas peut-

être, la TCC peut aider avec certains symptômes, elle ne peut permettre de guérir. Il

mentionne que, pour de nombreuses personnes, il est extrêmement irritant que l’on dise

« le noir est blanc », alors que l’on sent que le noir… est noir. Il assimile la TCC à une

méthode orthopédique, une forme d’hygiène, qui ne peut se substituer à un remède

dans la plupart des cas.


Le fondement de sa réflexion s’articule autour de la nécessité fondamentale à

rechercher les causes du mal-être psychique dans l’enfance, quelle que soit la thérapie

que l’on choisit, à contrario d’une thérapie qui chercherait à nous rendre plus

adaptables et/ou adapté.e.s socialement.


Nous aborderons ces éléments lors du cycle Alice Miller, qui se déroule - en francais- le lundi toutes les trois semaines de 18h30 à 19h30 heure de Paris, à partir du 16 janvier 2023. L'activité se déroule également en espagnol, le vendredi.


D’ici-là, Oliver James nous indique divers paramètres, au-delà de l’argent, du bonheur

ou de la santé mentale – des termes qui restent assez abstraits – qui peuvent nous

donner une indication pour savoir si nous sommes en train de vivre notre vie :


1- La capacité à vivre le moment présent.

2- La fluidité dans la communication (capacité à écouter et à donner notre opinion).

3- Insight / La connaissance : ce qui nous permet de discerner.

4- Playfulness / La capacité de jouer.

5- La vivacité (et non l’hyperactivité).

6- L’authenticité (et non la pleine sincérité).

7- La sagesse.






A très bientôt,


Mélanie Berthaud




This Be The Verse

They fuck you up, your mum and dad.

They may not mean to, but they do.

  They fill you with the faults they had

And add some extra, just for you.


But they were fucked up in their turn

By fools in old-style hats and coats,

   Who half the time were soppy-stern

And half at one another’s throats.


Man hands on misery to man.

It deepens like a coastal shelf.

Get out as early as you can,


And don’t have any kids yourself.

PHILIP LARKIN


::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::::


TEL SOIT LE DIT

Ils te niquent, tes père et mère.

Ils le cherchent pas, mais c’est comme ça.

Ils te remplissent de leurs travers

Et rajoutent même un p’tit chouïa – rien que pour toi.


Mais ils furent niqués en leur temps

Par des fous en chapeaux claques,

Tantôt sérieux et larmoyants

Et tantôt à s’traiter d’macaques.


L’homme refile la misère à l’homme.

Ça devient très vite abyssal.

Tire-toi de là, mets la gomme,

Et n’essaie pas d’avoir des mômes.


Traduction de Guy Le Gaufey (La vie avec un trou dedans-édition Thierry Marchaisse

2011)

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